En route pour l'écriture inclusive - 6e partie - Pourquoi c'est important.







6e Partie – Pourquoi c’est important

Que répondre à tous ces arguments contre l’introduction de l’écriture inclusive. Le marquage de la féminité dans un discours peut-il aider à la représentation de la femme, à une visibilité et un statut social ? Tout d’abord, je pense que le fait que ce combat puisse paraître mineur, ne justifie en rien son abandon. Comme le dit Viennot [1], il n’y a ni péril mortel, ni pensée dictatoriale, ni massacre. Juste un soucis de s’exprimer de manière plus exacte et plus égalitaire en s’appuyant pour l’essentiel sur les ressources traditionnelles de la langue française. Ainsi, « nous n’avons pas besoin de modifier la langue mais de renouer avec ses logiques en nous appuyant sur ses ressources » (p. 15).

L’académie française en rajoute, morceau choisi : « L’Académie française se sent d’autant plus concernée par les travaux de terminologie et de néologie qu’elle considère que ceux-ci viennent compléter l’entreprise lexicographique qui est sa mission première. En effet, ils permettent d’accompagner la langue française dans ses états les plus contemporains, en orientant ses créations encore instables et mouvantes, tandis que le Dictionnaire de l’Académie française rend compte d’une langue commune et pérenne, que l’usage a affermie et modelée. » Pourquoi donc s’opposer à cette évolution ? Est ce vraiment une novlangue ? Qui a la base est censé limité les termes, amenuiser une langue.



Les inégalités homme-femme.

Je ne reviendrais pas en détail sur les problématiques de genre/sexe l’ayant déjà évoqué dans un précédent travail. Toutefois, il me paraît pertinent de restituer ici quelques idées. Le sexe c’est la caractéristique biologique et physiologique. Le genre représente les rôles sociaux, le comportement, l’activité et les attributs qu’une société considère comme H ou F. Chaque sexe a une fonction et des rites propres, intériorisés et inculqués. Peu de sociétés sont épargnées par la domination des hommes sur les femmes, il s’agit pas ici d’une croyance mais d’un fait scientifique avéré [2]. Les études de genres affirment qu’il n’existe pas d’essence de la féminité ou de la masculinité mais une construction tout au long de la vie des comportements socialement attendus des individus en fonction de leur appartenance au sexe. Filles et garçon sont très tôt enfermés dans des rôles sexués qui peuvent devenir néfastes. Les filles ont tendance à manquer d’assurance vu qu’il n’y a pas, au plus haut niveau, des modèles de réussites féminin. Pour les hommes, le modèle d’hyper-virilité, s’il est encouragé voire valorisé, éloigne les garçons des attendus scolaires, inhibe l’expression de leurs émotions et les incite à la violence, à l’homophobie.



L’écriture aurait probablement un rôle à jouer sur cette question de l’inégalité si elle est tributaire d’éducation et de facteurs externes. En augmentant la présence des femmes dans les écrits, il est possible de démanteler progressivement le monopole masculin. Viennot ajoute « du reste s’il est évident que ces transformations ne seront pas suffisante pour instaurer l’égalité, on voit mal qu’elles puissent être considérée comme susceptible de la faire reculer » (p31)

De même, afin d’envisager une femme à un poste clé, l’existence du nom de métier pourrait aider. Cela permet d’éviter le « madame le maire » ou « Homme féministe » qui non seulement rallonge le discours mais font penser que l’association est contre nature.



Oui, la langue à un impact sur les perceptions

Dans la 5e partie, où il était question de déterminisme linguistique, j’avais relevé les doutes de certain·es. Pour autant[3], en fonction de la langue parlée, les tâche cognitive ainsi que de mémorisation peuvent être modifiée. Par exemple les russophone sont capable d’identifier plus rapidement des différences de note bleu probablement car dans leur langue il existe un champ lexical plus important.[4] Ce raisonnement semble également s’appliquer au genre où de multiples études ont pu montrer que la langue parlée ainsi que le genre de celle-ci avait des impact sur la vitesse de traitement et les représentation.[5][6][7]

 
La sémiologie pas si complexe

Arguments courants, les problèmes sémiologiques de l’écriture inclusive. L’ajout d’un point médian ou autres procédés pourraient créer des distorsions et des troubles de la linéarité lors de la lecture. Pourtant, il fut un temps où le point virgule, les points de suspension ou d’exclamation posaient problème et tout cela a été digéré en quelques décennies[8]. En outre, le point médian semble être là pour justement rendre les choses plus simples. Sur le marché du travail par exemple, les parenthèses sont utilisées dans les contrats. Pourquoi donc ne pas rester sur les parenthèses. Car en français, elles sont là pour marquer ce qui est optionnel ou secondaire. N’est ce pas moins simple et plus lourd ce point médian ? Le point médian serait difficile à taper selon certains détracteurs. C’est certes plus compliqué que d’appuyer simplement sur une touche. Toutefois écrire la phrase suivante [9] « Étonné, il jubile : « Ça marche ! » » vous demandera pas moins de 6 manipulations si vous souhaitez respecter les espaces insécables, les accents aux majuscules et les chevrons. Le point médian lui, vous l’aurez avec Alt+250 sous Windows, et Shift+Alt+F sous Mac. Pas si compliqué vous pouvez me croire. Ou en tout cas pas plus compliqué que le reste.



L’argument du sacrifice entre l’écrit et l’oral.


Dernier rempart à l’utilisation de l’écriture inclusive, notons la difficulté évoquée au passage de l’écrit à l’oral. Plusieurs arguments sont utilisables par qui sait lire. Tout d’abord, il existe dans de nombreux ouvrages des notes de bas de page ou des commentaires qui enrichissent les propos. D’autres part, la langue fourmille déjà de diminutifs ou d’acronymes qui n’empêchent pas un discours de se faire. « Mme » « Mr » « Mlle » « ndlr ». Le point médian, au même titre que ces précédents systèmes est l’encodage compact d’un signifié. Il s’agit donc plus d’un problème d’habitude, d’usage, comme « Mme » ne se prononce pas « Mmmme », « Les artisan·e·s » signifie et se lit « les artisans et artisanes » [41] et non pas « artisan - gn - eu - esse » [10] La réforme de l’écriture inclusive ne coûte rien et peut rapporter gros, c’est notre vision du monde qui sera modifiée. Les réflexions sur le langage inclusif sont l’occasion d’explorer ces mentalités qui résistent aux changements, mêmes les meilleures et de comprendre pourquoi elles s’y opposent [11]


Adelphiquement vôtres...


1er Partie – Introduction.

2e Partie – De quoi parle t’on ?

3e Partie – Un brin d’histoire.

4e Partie – Et la science dans tout ça ?

5e Partie – Un péril mortel ?

6e Partie – Pourquoi c’est un important ?

7e Partie – La Franc-Maçonnerie pas en reste.

8e Partie – En pratique comment on fait - Conclusion.






[1] Le langage Inclusif : Pourquoi, Comment Eliane Viennot
[2] Bourdieu, La domination masculine
[3] https://www.bunkerd.fr/ecriture-inclusive/
[4] Russian blues reveal effects of language on color discrimination”, Jonathan Winawer, Nathan Witthoft, Michael C. Frank, Lisa Wu, Alex R. Wade et Lera Boroditsky, Proceedings of the National Academy of Sciences, 2007
[5] Differential Sensitivity to the Gender of a Person by English and Chinese Speakers”, Jenn-Yeu Chen et Jui-Ju Su, Journal of Psycholinguistic Research, 2011
[6] Grammatical and conceptual forces in the attribution of gender by English and Spanish speakers”, Maria D. Sera, Christian A·H. Berge et Javier del Castillo Pintado, Cognitive Development, 1994
[7] Can quirks of grammar affect the way you think? Grammatical gender and object concepts”, Webb Phillips, Annual Meeting of the Cognitive Science Society, 2003
[8] Le langage Inclusif : Pourquoi, Comment Eliane Viennot . P 107
[9] https://www.bunkerd.fr/ecriture-inclusive/
[10] https://www.bunkerd.fr/ecriture-inclusive/
[11] Le langage Inclusif : Pourquoi, Comment Eliane Viennot P 108






Adelphiquement vôtres...


1er Partie – Introduction

2e Partie – De quoi parle t’on

3e Partie – Un brin d’histoire

4e Partie – Et la science dans tout ça

5e Partie – Un péril mortel

6e Partie – Pourquoi c’est important

7e Partie – La Franc-Maconnerie pas en reste ?

8e Partie – En pratique comment on fait - Conclusion


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