Planche symbolique d'Apprenti - La fin d'un Apprenti, le début d'un Apprentissage.

SPOILER ALERT :   profane    APPRENTI    compagnon    maître




 
Pour rappel...
...ce blog est une initiative personnelle. Son objectif est de me pousser à réfléchir, et d’éventuellement recueillir quelques avis. Le tout pour progresser. J’attire ton attention cher toi qui lis ce billet, méfies toi tout de même si tu n’es pas initié. D’une part, tu risques ici d’apprendre des choses pour pourraient te gâcher le plaisir. D’autre part, tu ne saurais saisir toutes les allusions discrètes camouflées dans ce texte. Je te laisse donc entamer cette lecture à tes risques et périls.



Je suis actuellement dans une situation singulière. 
Je vole au dessus de l’Océan, et j’ai 5 heures devant moi. Dans cette coque de métal, je me sens un peu comme en loge. Le temps et différent, l’espace aussi. Cette sensation particulière d’être en décalage avec quelque chose. Le jetlag, le passage des barrières douanières, les uniformes, l’universalité des gens qui errent, l’attente, l’embarquement, les consignes de sécurité sans qui on ne pourrait partir et décoller. Nous retrouvons ici un rituel, bien rodé et souvent identique. J’y vois un symbole de sécurité et je m’y sens bien. Pas vraiment sur terre, pas vraiment dans les étoiles. Un moment parfait pour faire le bilan.


Me voici donc, à la veille de mon augmentation de salaire et j’aimerai pour cette dernière contribution symbolique en tant qu’Apprenti poser une pierre très personnelle sur mon parcours maçonnique actuel. Je devrais passer compagnon sous peu, une nouvelle histoire va s’ouvrir à moi. Passée l’excitation et la curiosité, je me dis que finalement, ça aura été vite, et un sentiment de nostalgie me gagne. Qui l’eût cru ? Où est donc passé le temps où je pensais avoir fais le tour ? Au pied du mur, je n’ai jamais été aussi loin, comme si en levant les yeux maintenant je me retrouvais face à une façade infranchissable, avec le sentiments de ne pas être allé au bout des choses.

 
Que garder de ce grade d’Apprenti ? 
La première pensée qui me vient, est cet inlassable axiome que j’entends dans chaque bouche autour de moi : « On reste un apprenti toute sa vie ». Mais le reste-on vraiment au sens maçonnique du terme. La passage à l’étape d’après, c’est aussi quitter une situation. Là où j’en suis, je me dis qu’au final on est apprenti qu’une fois et qu’il est impossible d’y retourner. On a une certaine innocence qui sied à l’inexpérience. Cette beauté apanage de la jeunesse, je ne sais pas si je la retrouverai ensuite. Finalement, orner est un luxe, il permet de réfléchir et de mirer, donc de sublimer, soi-même et les autres. Pour autant le miroir n’est pas si loin.


Je me souviens de mon initiation...


Je me souviens de l’obscurité...
...dans ce lieu lugubre où les odeurs d’humus, de miasmes se mélangent au souffre, et à la terre. Retour aux sources ou fin de vie ? Je ne saurais trop l’écrire, ne pouvant le lire car il dépend de chacun.e.s, je ne peux que l’évoquer. Ce retour à la matière, à cette glaise métaphorique primordiale de chaque nouvelle naissance. Rappeler s’il en faut que nous ne sommes pas grand chose...



Je me souviens...
...de ce moment très fort durant lequel mes frères et sœurs me prirent les mains. J’étais comme un témoin que l’on passait d’une main à l’autre. C’est vraiment à ce moment, lorsque j’ai pu identifier privé de mes sens, une telle diversité de texture de peau, de température, de mouvement, que j’ai réalisé ce qu’était la fraternité. Je me sentais accepté sans jugement, par la bienveillance que je ressentais. J’ai un esprit très (trop!) analytique. A cette époque, j’étais bien hermétique au symbolisme et à l’ésotérisme... Pour autant ici, je crois avoir ressenti un egrégore, une parenthèse particulière, où l’instant se charge de quelque chose de palpable ; comme si tout convergeait vers un bien commun unique.


Je me souviens...
... avoir reçu la lumière. Je retrouve sans effort ce fragment mémoriel intact. La mise au point de mes rétines due au passage de l’obscurité à l’irradiance de mes frères et sœurs qui du bout de leurs lames me souhaitaient la bienvenue. Cette surprise m’avait ébahit. Je n’ai eu de cesse juste après de lorgner de tous côtés pour m’enquérir de l’endroit où je me trouvais. Les couleurs, les armoiries, les bijoux immobiles, les cordes, métaux, cailloux, décorations. Tout était nouveau, tout m’interpellait et me questionnait, avec cette excitation toute enfantine de celui qui s’émerveille d’un rien. La voici cette béatitude, ce pilier qui soutient le temple du second qui surveille.


Je me souviens...
...m’être assis tout au bout du septentrion, de ce côté où il manque une colonne. Je comprends maintenant que c’était pour soutenir notre temple et constituer cette fameuse 4e colonne, assurant à celui-ci une tenue juste et parfaite. Oh pour sûr, il n’est jamais terminé puisque ouvert sur le cosmos, mais un 4e pied n’est pas de trop pour soutenir cet édifice de plus de 300 ans. Ce temple a besoin de sacrées fondations pour se tenir droit et les apprentis, tout bruts qu’ils sont, font le boulot bon an mal an. De beaux cailloux bien rugueux, voilà ce qu’il faut pour assurer une belle adhérence.


Je me souviens...
...de ce sentiment que j’ai éprouvé lorsque j’ai vu cette chaîne s’ouvrir pour moi, ces mains tendues et serrées, ces bras croisés les uns sur les autres. Une union physique et mentale pour ce moment ouvert sur l’universel. Ces trois secousses ressenties comme pour montrer que ce lien ne peut se rompre, cet attouchement incompréhensible qui laisse une trace sur ma main quand le cercle se rompt à nouveau.


Le devoir d’assiduité comme règle de conduite.
C’est dans le travail régulier, dans l’application que le progrès peut se faire. J’ai bien compris, que c’est en forgeant qu’on devient forgeron (d’où l’intérêt de ce blog par ailleurs). La régularité, au sens propre, tel l’équerre, permet une droiture dans la charge. Ce n’est ainsi qu’au bout d’une dizaine de tenues que j’ai commencé à retenir un peu la structure du rituel, ses différentes étapes. J’ai compris progressivement le cadre et les avantages qu’il offrait : un sas spatio-temporel de décompression. C’est notre moyen de se couper du monde pour aller à l’essentiel. Je ne suis jamais lassé de ces minutes durant lesquelles nous vivons une transition progressive, du profane vers le sacré.


Le symbolisme
Au grade d’Apprenti, il nous est demandé de produire un travail symbolique. J’ai mis un temps certain à comprendre l’intérêt de l’exercice. Au départ, cela me paraissait d’une abstraction absconse (dur à prononcer non?). Mon premier travail accessible ici m’avait laissé un sentiment mi figue mi raisin. Je m’étais appuyé sur quelques écrits, j’avais questionné mon surveillant. Je ne savais pas comment procéder, comment construire un travail sérieux. Au final, j’ai construis quelque chose de pas trop mal mais d’un peu formel. J’ai compris par la suite que les aspirations du grade, c’est parler de soi. C’est se livrer de manière juste, en s’approchant du parfait, entre le débat de comptoir et la psychanalyse puisque ce n’est ni une discussion informelle (pourtant que c’est important de boire), ni une thérapie. C’est une introspection, qui nourrit une quête de sens. Voilà peut être au final ce qu’est une planche symbolique. Je me suis donc livré à l’écriture d’un autre symbole, le fil à plomb et petit à petit, j’y ai pris goût. A chaque nouveau coup de ciseau, à chaque étude je découvre de nouvelles choses. Je me suis forcé, obligé, à écrire tous les mois, à choisir un outil.



Étudier avec ou sans aide ?

C’est une question que je me suis posé de nombreuses fois. Collecter des informations écrites ? Ne sachant pas lire, cela paraît difficile. Pour autant, je pense que dans mon cas, ce fût nécéssaire. Après quelques mois, j’étais complètement perdu et dans le flou. J’ai eu besoin de me nourrir et ça m’a permis de me libérer. En ayant des bribes d’information, le tout est plus facile à comprendre. Nos surveillants sont aussi là pour ça et il nous guident lors des réunions avec d’autres apprentis. J’ai eu la chance d’en connaître quatre. Chacun avec sa personnalité et son idée de la tâche. Quelle chance ce fût. Mes pensées les plus fraternelles vont vers eux à cet instant.



La société pas en reste.
Au Grand Orient De France, nous avons la chance de traiter des sujets sociétaux. Les échanges qui en résultent me sont très utiles. Soumis au silence, je peux profiter de ces débats et apports, qui m’enrichissent, tant sur le plan maçonnique que profane. Je ne regrette absolument pas d’avoir choisis cette obédience, après avoir hésité avec le DH. Son système bottom up me plaît beaucoup même si, il présente des failles dans son modèle démocratique au plus haut niveau. La politique finit toujours par s’en mêler, normal pour la réunion d’hommes et de femmes avec leurs qualités et leur défauts.



Ici nous sommes sur le même bateau.
Les copains d’abord ? Pas seulement. La fraternité peut être ? Cela me paraît trop restrictif. L’union adelphique? Ça me botte plus, devant l’universel du mot. J’ai la chance d’être dans une loge mixte. Il n’aurait pu en être autrement, comment se couper de 50% de l’humanité et se prétendre universel ? Question polémique toutefois, je comprends tout à fait le choix de se réunir seulement en groupe restreint, dans un genre défini. Ce que je ne comprends pas par contre, c’est refuser les visiteuses. Puisqu’être compagnon c’est voyager, tant qu’il en est ainsi, je ne visiterai pas ces loges.



2 ans c’est long mais c’est court. On se retrouve de l’autre côté. Pour le meilleur...





Commentaires

  1. Moi, ce qui me surprend, c'est que l'on vous ait accordé une augmentation de salaire ����

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    1. Merci pour votre message. Comme quoi, tout peux arriver. Cela montre la belle ouverture que constitue la maçonnerie. Fraternellement. Bien à vous.

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  2. Voyageant sur un chemin parallèle au tien, je me retrouve dans tes écrits et tes ressentis. Bonne route à toi...

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  3. Etant dans le même voyage mais au DH j'ai les même ressentis que toi sur pas mal de points que tu as exprimé . J'aime ta façon de le dire ! Pourquoi je l'aime ? Justement, parceque je la trouve très personnelle et que je me demande encore si c'est bien comme cela que je dois regarder ma démarche chaque fois que je fais un travail écrit et ton texte me conforte dans ma façon de voir. Merci

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    1. Mon FF/Ma SS, merci pour tes mots. Au plaisir d'échanger d'autres sujets. Adelphiquement.

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  4. Bonjour mon Frère,
    Tout jeune apprenti, je découvre avec plaisir ton blog et tes écrits, qui me permettent de commencer à comprendre un petit peu mieux le travail qui m’attend.
    Est-il possible d’échanger par mail avec toi?
    Fraternellement,
    E.

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    1. Bonjour mon frère ? Ma sœur? Avec grand plaisir. taillersapierre@gmail.com pour me joindre. PS : Vraiment désolé, je remarque ton commentaire juste maintenant. Adelphiquement.

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