Planche symbolique de Compagnon - La pierre cubique à pointe

SPOILER ALERT :   profane   apprenti   COMPAGNON   maître


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Au début, il n’y avait rien. Le froid peut-être ? L’obscurité sûrement ! Et un brin de lumière, feu de bougie qui tremblotait au moindre souffle. Venu de rien à l’épreuve des 4 voyages, une équerre a émergé du néant.

 

Avec ses deux bras de même longueur, de toute beauté, elle était encore timide d’exister. A n’en pas douter, elle pouvait se targuer d’un bel angle droit, signe de sa rectitude et de son honnêteté. D’ailleurs, elle ne prétendait pas pouvoir rendre autre chose que ces 90 dégrées, tout juste avait elle la réserve d’un silence misanthropique. Seulement, posée ainsi, seule, elle n’indiquait rien. Sans orientation, elle ne pouvait vérifier ni la rectitude, ni l’ordre des choses ainsi dépourvu de contingence. Elle avait besoin d’un ou d’une autre pour exister. Comment se voir soi-même sans alter ego?

 

Elle croisa alors une autre équerre qui, elle aussi, était toute seule. Toutes heureuses de se rencontrer, elles comparaient leurs angles pour s’apercevoir qu’elles se ressemblaient beaucoup. Toutes deux partageaient la droiture et la rectitude. Ces biens communs précieux, qui valaient tant pour l’une comme pour l’autre. Elles comprirent soudain qu’en se plaçant pieds à pieds, elles pouvaient créer une nouvelle dimension : un plan fermé. Ainsi naquit le carré.

 

Content lui aussi, puisque parfait sous tout rapport, le carré se vantait d’exister par la combinaison des deux et la quadrature d’un cercle imaginaire tracé par son ami compas. Ce dernier, si libre et volage, se pâmait de mots d’esprits. Bien loin des considérations de notre quadrilatère, pas aérien pour un sou. Sa force à lui, c’était la matière, la sincérité brut de décoffrage, la stabilité mathématique. Toutefois, cet espace ainsi crée, ne lui seyait guerre et voici que, le bougre, décida d’outrepasser sa charge.

 

Quel élan lui pris soudain, d’inscrire dans sa colonne une troisième dimension. Étendant ses arêtes à même l’espace, le voici Cube. Il était certes plus volumineux ainsi mais quelle profondeur conquise, quelle sagesse amadouée.

 

Il tenait maintenant debout tout seul, sans l’aide de personne. Ainsi posé, il était d’une stabilité parfaite. Inébranlable, il présentait ses 6 faces à qui le veux. Quelle belle pierre il était. Tout le beau monde ici présent se faisait les dents sur sa parure. Le compas artiste vérifiait ses proportions ; la règle maniaque s’intéressait aux arêtes ; niveau et fil à plomb, en collégialité, s’assuraient de sa conformités aux semblables ; quand le levier, joueur, ne le retournait pas dans tout les sens, comme si, à la manière d’un Rubik’s Cube, il y avait une nouvelle possibilité à chaque rotation.

 

Chacune de ses faces était juste et parfaite. A la manière d’une œuvre d’art, il représentait l’achèvement et la constance dans le travail. Même les observateurs les plus zélés n’auraient pu le mirer dans son intégralité. Malgré sa posture érigée en principe, c’est qu’il avait sa part cachée, absolue, comme toute chose. On ne pouvait distinguer de lui que 3 de ses faces en même temps. Une partie invisible laissant présager l’inaccessible et l’infini. Il était à la fois unique, par sa naissance, mais multiple car parfait, en un sens, interchangeable.

 

Peut être trop sérieux, et comme il tenait à sa présentation, il reconnu qu’un chapeau pointu ne serait pas de trop. Ajouter un peu de folie au style n’est-il pas l’apanage de l’artiste. Lançant quatre rayons de lumières de ses sommets en direction de son étoile, ces faisceaux tendus se réunirent en un point de convergence parfait. Une pyramide sur la tête le transforma en pierre cubique à pointe.

 

On peut dire qu’il avait atteint le rang de chef d’œuvre finis. Le sacré pyramidal, cette quête initiatique, sur la stabilité de l’assise offerte par l’union des équerres. Ainsi constitué, rien, pas même une quelconque hache n’aurait pu le fendre, encore qu’un tel outil feignant la paresse aurait prétexté être victime d’une infâme controverse. Lui prêter l’étincelle de la vie aurait été le maximum.

 

La rectitude et la droiture auront amené, par alchimie, à cette représentation de l’idéal à atteindre. En marchant à reculons, il avait trouvé son sens et sa voie. On aurait pu l’appeler crédo, pierre philosophale ou merveille, il n’en avait cure puisqu’il avait atteint son avatar prêt à enrichir un temple universel en quête de nouveaux maillons.

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