Fiche de lecture / Critique - Y a-t-il un grand architecte de l’Univers ?


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Fiche de Lecture - Y a-t-il un grand architecte de l’Univers ?
Par Stephen Hawking et Leonard Mlodinow
 
Deux auteurs prestigieux pour ce livre de 2014, dont Stephen Hawking, qui marqua son temps de bien des façons. Par son parcours, par sa maladie, pas ses idées, par son humour, par son étrangeté. Icône qui a vécu si longtemps avec cette maladie qui est censé condamner quiconque en 5 ans.


Ce livre m’a été offert par un ami, un frère, qui saura se reconnaître. En me le donnant, il m’avait dit : « c’est pour l’anecdote ». Je me suis dit que j’allais tout de même faire une fiche de lecture, au moins pour saluer ce don.


Vulgarisation scientifique 

Ce livre de vulgarisation scientifique, se propose au travers de ses quelques 200 pages de répondre à la question ultime. A la fois scientifique, philosophique, théologique et historique ; sa lecture est agréable bien que parfois assez pointue. Les auteurs tentent d’apporter une réponse, ou pas, à la question : une entité divine est elle nécessaire pour expliquer tout ça ? En ce sens, ils cherchent à savoir si un jour, une théorie expliquant « tout » aussi appelé « le grand dessein » sera découverte. Cette théorie fantasmée se nommant la M-Théorie (dommage, à quelques lettres près, on tombait sur la lettre G). Personne ne semble savoir si ce M signifie Miracle, Maîtresse ou Mystère (p.44). Cette théorie du grand tout irait dans le sens de l’union du philosophique et scientifique (ce pour quoi il a été critiqué par ailleurs, Hawking étant un agnostique convaincu)

Par delà la dimension maçonnique, les trois questions soulevées ici sont : 

- Pourquoi y a t’il quelque chose plutôt que rien ?
- Pourquoi existons nous ?
- Pourquoi ces lois particulières et pas d’autres ?

 
Le modèle-dépendant
L’approche prônée ici porte le nom de « modèle-dépendant ». Si deux théories ou modèles expliquent ou prédisent avec précision les mêmes événements, il est impossible de déterminer laquelle des deux est plus réelle que l’autre. Dans ces conditions, on est libre d’utiliser le modèle qui sied le mieux. Toute théorie physique ou toute image du monde consiste en un modèle (en général un formalisme mathématique) et un ensemble de lois qui relient les éléments du modèle aux observations. Cette approche se retrouve au quotidien par la création de modèles mentaux conscients et inconscients que nous créons dans notre besoin de comprendre et d’interpréter le monde (p. 57). Notre perception n’est pas directe puisque interprétée par nos organes sensoriels. Elle est construite à travers le cristallin qui est la structure d’interprétation de notre cerveau humain. 


Qu’est ce qu’un bon modèle-dépendant en science ?
Pour être bon, il doit satisfaire certaines règles (p.64)
- Être élégant,
- Ne contenir que peu d’éléments arbitraires ou ajustables,
- S’accorder avec et expliquer toutes les observations existantes,
- Pouvoir prédire de façon détaillée des observations à venir, qui à leur tour permettront d’infirmer ou de disqualifier le modèle si elles ne sont pas vérifiées. 


Une présentation historique des lois
Nous suivons au cours des premiers chapitres un rappel historique de la création des divinités en parallèle des évolutions scientifiques. Isaac Newton est bien évidemment évoqué (un franc-Maçon? ) comme étant l’un des premiers à avoir permis l’acceptation du concept de loi scientifique. On pourrait définir une loi comme suit (p. 36) : une loi de la nature est une règle établie par l’observation d’une régularité, permettant d’énoncer des prédictions qui dépassent les situations immédiates les engendrant.  


M comme Miracle
Si l’on revient aux questions débattues, Newton comme d’autres (Galilée, Descartes, Kepler...) affirment que ces lois sont l’œuvre de Dieu. Il s’agit d’une personnification des lois de la nature. Que faire lorsque les lois ne s’appliquent plus ? Il suffit à nouveau de convoquer Dieu en affirmant qu’il décide lui même de les modifier, à sa guise. On appelle cela un Miracle (doublé d’une belle dissonance cognitive triplé d’un principe d’irréfutabilité). Laplace et probablement le premier à avoir développé le déterminisme scientifique. En connaissant le passé et le futur via des lois physiques, on exclut alors tout miracles divins puisqu’on peut prédire l’avenir et expliquer le passé. 


La réalité
Une métaphore singulière qui m’a beaucoup plus. Celle du poisson rouge dans son bocal. Celui-ci voit la réalité déformée, derrière le prisme du verre. Il n’empêche, cela ne modifie en rien les lois et les observations qu’il pourrait faire puisqu’elles seraient faîtes à partir de son référentiel. Dans ces conditions, nous tomberions sur le même résultat dedans ou dehors. L’univers serait compréhensible parce qu’il est gouverné par des lois scientifiques ; autrement dit, on peut modéliser son comportement. 


La physique quantique
Évidemment, les auteurs nous apportent une définition et de multiples exemples de ce qu’est la physique quantique. En partant de l’expérience des fullerènes qui prend tout son sens une fois transposée à un footballeur qui shoot allègrement sur des cages à travers des fentes (quelle idée...). Il en ressort que les constituants élémentaires obéissant au monde quantique se comportent bien différemment lorsque le niveau macroscopique est convoqué (par exemple les lois de Newton (p.83)). Une transposition élégante et qui me plaît bien car retrouvé en maçonnerie est qu’un assemblage important se comporte différemment de ses composantes individuelles. Rassurons nous toutefois, ça n’est pas demain que nous serons capable de transposer les expériences quantiques aux éléphants, et ce malgré le discours de quelques gourous en manque d’adeptes.  


Maçonnerie et Physique Quantique
Un petit élément de symbolisme. En physique quantique, pour réaliser une observation, on se doit d’interagir avec l’objet étudié. Cela affectera le système lui-même ainsi que les mesures sur celui-ci. Que penser de l’apprenti qui observe sans intervenir ? Et bien son observation seule, quand bien même il resterait silencieux, produit des modifications du système, la loge. 


Et Dieu dans tout ça
Comme disait Einstein, tout se passe comme si Dieu jouait aux dés avant de décider du résultat de tout processus physique (p.88). On parle ici de probabilité et pas de déterminisme (comme Laplace prétendait, si vous me suivez...). Les calculs permettent une prédiction du possible. La science est dans la capacité aujourd’hui d’amener des éléments de réponses aux trois questions princeps et ce, sans forcément avoir besoin de convoquer le grand Barbu (qui au passage se trouve presque toujours être un homme à barbe) 


Le big Bang
Grâce à Hubble, on sait aujourd’hui que l’Univers est en expansion constante, et d’autant plus rapide que les étoiles sont éloignées ( à la manière d’un ballon de baudruche qui se gonfle). Les modélisations ont permis de comprendre qu’il y aurait eu un Big Bang il y a 13 milliards d’années. Cette approche se nomme une approche « Top Down » (du haut vers le bas) contraire à l’explication « Bottom Up » qui sied à la théologie. En cosmologie, il faut renoncer à voir l’Histoire de l’Univers vers une approche ascendante supposant une histoire unique avec un point de départ et une évolution, mais au contraire adopter une approche descendante en remontant le cours des histoires possibles à partir du présent.


Trop impossible pour que ce soit une coïncidence ?
Depuis 1992 (va p.186), on sait aujourd’hui qu’il existe plusieurs centaines de planètes similaires à la nôtre parmi les milliards d’étoiles de notre Univers. Du coup les coïncidences de nos conditions planétaires n’auraient pas été conçues pour les hommes. En ce sens, l’orbite de la planète, notre position par rapport au soleil, seraient des facteurs environnementaux. Mais alors, si tout est si bien conçu, comment ne pas penser que Dieu en a décidé. Plus la science progresse, et plus l’aile naturaliste des théologiens postule que la réalité d’un schéma immanent se précise. Nous pouvons dire qu’aujourd’hui l’ajustement fin des lois de la nature peut s’expliquer par l’existence de multiples univers (concept des multivers p.202). Dans la mesure ou notre univers n’est pas unique, et qu’il n’est pas le seul à avoir émergé du néant, (p 16) convoquer une entité divine est il nécessaire ? 


Le jeu de la vie de John Conway, une réponse possible
Crée en 1970, ce jeu qui n’en est pas un, est un ensemble de lois qui gouvernent un univers bi-dimensionnel. Il s’agit d’une grille carrée analogue à un échiquier mais s’étendant à l’infini dans toutes les directions. Ici pour les détails. Ce que nous apporte ce jeu de la vie est que sa « chimie » est compliquée même si sa physique, ses lois initiales, peuvent être très simples. Du coup, la transposition pour notre monde se fait simplement. Notre monde est complexe et pour autant, il pourrait être construit simplement avec quelques règles simples. 


Peut on définir une théorie du tout ?
Il semblerait que l’espoir constant d’une théorie unique de la nature soit vain et qu’il n’existe aucune formulation unique. Pour décrire l’Univers, les scientifiques sont dans l’obligation d’employer différentes théories dans différentes situations. Chaque théorie ayant sa propre réalité dans le réalisme modèle-dépendant acceptable. Il est raisonnable de se demander qui ou quoi a crée l’Univers mais si la réponse est Dieu, alors on ne fait que repousser le problème à celui de la création de celui-ci.

Adelphiquement vôtre.

Commentaires

  1. Peux mieux faire, mais c'est déjà mieux que tout ce qui s'apparente à la maçonnerie théiste

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